Le secteur des RH désarticulé

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Les mécaniciens se contentent de plus en plus souvent d’une réinitialisation informatique pour ré-parer les voitures : en cas de réclamations, vous communiquez avec une machine au service clien-tèle, des robots adroits préparent les commandes dans des points de distribution gigantesques… Parmi les collaborateurs physiques qui restent, la moitié souffre d’un burn out pendant que l’autre moitié refuse d’admettre que la numérisation et la désarticulation battent leur plein. Question : « Comment le secteur des RH va-t-il évoluer ? »

Notre société, à commencer par le monde des entreprises, connaît une numérisation (automatisation) poussée. Parfois, elle est tellement rapide (ou subtile) que c’est à peine si l’on s’en rend compte. Pourtant, certains se demandent si leur emploi continuera d’exister… Ils ont raison de s’interroger car l’automatisation poussée risque de vous faire perdre votre travail pour vous faire remplacer par une machine ; à moins que vous ne vous retrouviez sur la touche parce que vous ne disposez pas des aptitudes requises par ces nouveaux emplois. Peut-être êtes-vous trop attaché à des connaissances et aptitudes dépassées.

À l’aide, le robinet fuit

Tout cela est vrai mais lorsqu’un robinet fuit, il faut quand même toujours faire appel à un plombier en chair et en os ? Eh bien, bonne chance pour en trouver un de disponible. Et d’ailleurs, qui dit que vous ne prendrez pas bien-tôt de l’eau à l’aide d’une espèce de robinet prêt à l’emploi et à usage unique ? Un truc que l’on commande en ligne et qu’un robot se charge ensuite de… Et l’on connaît la suite. 

Hier, nous pensions tous encore qu’il y aurait toujours du travail pour ceux qui ne craignent pas de se retrousser les manches. Mais aujourd’hui, si un mécanicien automobile refuse de se recycler dans la robotique et l’électronique, son avenir n’est pas assuré. Les « solutions » numériques dans les différentes formes de contact client et de commandes réduisent d’ores et déjà, de manière considérable, le nombre de cols blancs dans les entreprises. Il s’agit d’un poison insidieux. Car que faisons-nous tous ? Nous refusons d’admettre l’inévitable : l’on n’en arrivera certainement pas là, rien ne sert de s’inquiéter, le problème concernera les générations suivantes… Hélas non.

Le coaching « personnel » via une application

Il existe même depuis longtemps des applications pour smartphone qui permettent aux collaborateurs de se coacher eux-mêmes en tant qu’équipes autoguidées et automotivantes. Comment ? Tout simplement en répondant à des questions. Le serveur auquel est reliée l’application regroupe toutes les questions possibles ainsi que leurs réponses.  Ce n’est que si un brin de coaching personnel est nécessaire après avoir suivi le parcours stéréotypé et uniforme, à la fin du « trajet d’accompagnement », que l’on peut appeler un collaborateur en chair et en os, ou lui adresser un courriel. Pour les questions restées sans réponse. Certes, nous n’en avons pas fait l’expérience nous-mêmes, mais il est clair que les équipes autoguidées existent d’ores et déjà.

L’homme derrière le travailleur

« Nous sommes vraiment inquiets pour les départements RH dans nos entreprises », nous confie Marleen Boen, l’une des animatrices de Training & Coaching Square. « Car là aussi, la désarticulation fait des dégâts. Les départements RH ont résisté un peu plus longtemps car ils se soucient de l’homme qui se cache derrière le travailleur. Mais ils semblent devenir eux-mêmes la victime de leur humanité, à présent que l’automatisation a réduit le nombre de personnes dont il faut se soucier. » 

« Disons les choses telles qu’elles sont ! Les RH sont parfois considérées comme superflues : pourquoi faudrait-il consacrer de l’argent à un département qui se soucie du bien-être des personnes ? Bien entendu, l’on a tort de raisonner ainsi. Mais si la désarticulation frappe aussi le secteur des RH, qu’aura-t-on à la place ? Certaines entreprises ont déjà réduit leur équipe RH au strict minimum. Même si elles placent l’homme et le travailleur au centre de leurs préoccupations… dans leur déclaration de mission. Et un grand nombre d’entreprises internationales se contentent désormais d’une équipe RH restreinte basée dans un seul siège, à Londres par exemple. Peu importe les différences importantes que l’on rencontre sur le plan de la culture et de la législation sociale des différents pays où l’entreprise est active. »

« La numérisation réduit le nombre de travailleurs qui, parallèlement, ne se sont jamais autant plaints d’un manque de considération et d’une charge de travail trop élevée. Que faire en tant que directeur RH ? Il s’agit après tout de notre capital humain. Quel sera le nouveau rôle des collaborateurs RH ? La réponse se trouve peut-être dans les valeurs partagées, dans l’intelligence émotionnelle ou dans l’abandon de l’éternelle course aux performances. Les personnes sont des « êtres » humains, et non pas des « faires » humains. » 

« Le secteur des ressources humaines devra de toute manière se réinventer, en tout ou en partie. Les collaborateurs RH veulent des réponses, mais ils ne les trouveront que progressivement. En effet, certitude et prévisibilité ne vont aucunement de pair avec la désarti-culation. En tout cas, il faut cesser de clamer que l’être humain est irremplaçable. »

Le meilleur de deux mondes

Peut-être les départements RH doivent-ils embrasser la numérisation, mais de manière contrôlée et dirigée ? Et opter ainsi pour le meilleur de deux mondes ? Sans doute devront-ils se distancier de tout excès d’inquiétude pour l’humain, répartir leur attention d’une autre façon, mettre d’autres accents. Pour pouvoir malgré tout continuer à accompagner les collaborateurs d’une entreprise, et pour optimiser la relation entre les collaborateurs et les managers. Ou encore pour garder leur propre emploi.

La solution, quelle qu’elle soit, sera de toute façon fondée sur une extrême flexibilité. Une capacité d’adaptation suffisamment grande pour suivre le cours de l’évolution tout en l’observant et en identifiant et en comprenant les nouveaux besoins RH des collaborateurs. Quoi qu’il en soit, les collaborateurs RH doivent cesser de donner ou de suivre les mêmes cours sur le leadership qu’il y a 30 ans. Ces cours (et les leaders) sont complètement dépassés et n’ont plus aucune valeur ni importance. Les nouveaux leaders d’après la désarticulation devront en tout cas engager plus qu’aujourd’hui le dialogue avec les collaborateurs. Et ils devront réfléchir davantage aux aspects divergents des emplois et des carrières.

La désarticulation soulève également des questions en matière de RH

  • Quel est le rôle actuel des RH ?
  • Les RH ne se perdent-elles pas dans leur propre labyrinthe ?
  • Comment les RH vivent-elles la peur de l’échec et la peur en général ?
  • Comment les RH se profilent-elles pour offrir de la valeur ajoutée ?
  • Quelle place les RH peuvent-elles occuper sur le plan de la conscience et de la prise de conscience ?
  • Les RH osent-elles se dresser contre des décisions superficielles et des gains à court terme ?